« Régler les problèmes de la banlieue avec 0,35% du budget de l’Etat ? »
Jeudi 05/02/2009 | Posté par Romain Santamaria
PLAN BANLIEUE. En Seine-Saint-Denis, le Plan Espoirs Banlieue a déçu, à commencer par Claude Dilain. Le maire de Clichy-sous-Bois y croyait. Un an après son lancement, force est de constater que les solutions sont loin d’être trouvées. En cause, des moyens insuffisants et une méthode à revoir. Et sur le terrain, ça se voit
« Le plan banlieue, ca reste homéopathique. » Pour Claude Dilain, maire de Clichy-sous-Bois (Seine Saint Denis), le bilan est décevant. Pourtant, comme plusieurs maires de banlieue, il avait été séduit par l’annonce de ce programme d’actions, le 22 janvier 2008. « Ce qui nous avait plu à Vaux-en-Velin (Rhône), c’est que Fadela Amara affirmait que les problèmes de la banlieue concernent tous les ministères, culture, justice, éducation, aménagement du territoire », souligne-t-il. Mais très vite, le plan Espoirs banlieue en a désespéré certains.
À commencer par la ministre elle-même. À peine lancé, la plupart des ministres avait traîné la patte. En juin dernier déjà, elle avouait avoir dû « tanner » les membres du gouvernement pour qu’ils s’impliquent dans le Comité interministériel des villes (CIV). En cause, des problèmes d’agenda… et « des budgets pas extensibles », selon elle. Du coup, « retard pris à l’allumage sur plusieurs chantiers », se justifiait la ministre. D’autres l’ont trouvé flou. Selon, Rachid Kadioui, coordinateur du PIJ d’Aubervilliers, « le plan n’a pas accroché les jeunes. »
Sur le terrain, même constat. Selon Claude Dilain, « les unités territoriales de quartiers, à Clichy on en a une, quatre dans le département de la Seine-Saint-Denis, c’est limité ». Nicolas Sarkozy en annonçait 200 dans l’ensemble des quartiers prioritaires.
Conséquence des lenteurs accumulées, les chantiers prioritaires comme l’emploi avancent moins vite qu’annoncé. 2 000 contrats d’autonomie signés contre 4 500 prévus pour 2008. « À Clichy-sous-Bois, on en est à une trentaine », affirme Claude Dilain. Et de poursuivre que si la ministre atteint ses objectifs « c’est très bien» tout en rappelant que « la ville a déjà des dispositifs permettant aux Clichois d’accéder à l’emploi ». Les acteurs de terrain comme Rachid Kadioui abondent dans ce sens.
« En matière d’emploi, il y a des déjà des choses de faites. Le Plan banlieue n’apporte rien d’innovant », selon lui. D’ailleurs, il pose une question : « Inventer des dispositifs ou booster les actions déjà menées ? » Pas si simple, on le concède. Mais pour les habitants des quartiers le sentiment de déjà-vu prédomine. Dans le domaine de la réussite éducative, par exemple. « Cela fait 17 ans que je travaille sur la ville alors l’accompagnement scolaire, je connais », note Rachid Kadioui. Le Plan Espoirs banlieue, faire du neuf avec du vieux, avec au passage un souci d’économie.
Or, pour qu’un plan fonctionne, il faut de l’argent. Claude Dilain ne dira pas le contraire. « Va-t-on régler tous les maux des banlieues avec des crédits spécifiques soit 0,35% du budget de l’Etat ?» La réponse semble évidente. De son avis, l’insuffisance de moyens déployés pour le plan ne suffit pas à expliquer son absence du terrain. « On utilise des crédits spécifiques comme si la banlieue, c’était pas le problème de la France ! » déplore le maire de Clichy-sous-Bois.
« Est-ce que l’échec scolaire concerne les crédits spécifiques ou l’éducation nationale en général ? », poursuit-il. Plus qu’un déficit de moyens, c’est la genèse même du plan qui pose problème. On reste dans une certaine forme de ghettoïsation du problème. La question du désenclavement de Clichy-Montfermeil par le prolongement du T4 en est d’ailleurs une preuve. « Est-ce normal qu’Amara intervienne ? », remarque Claude Dilain. « Après tout, on ne la sollicite pas pour le tracé du TGV, c’est un problème d’aménagement du territoire. »
Par Anonyme