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Les Tanguy des banlieues

Lundi 01/12/2008 | Posté par Marlène Schiapppa

Le film d’Etienne Chatillez a connu un franc succès au cinéma et encore hier soir sur TF1. Le pitch ? « Il a 28 ans et il habite toujours chez ses parents. » Un scénario qui renvoie de nombreux banlieusards à leur propre histoire...

Vivre chez ses parents jusqu’au mariage ou presque, c’est une tradition en banlieues. Selon l’INSEE, 44% des jeunes âgés de 18 à 29 ans vivent toujours chez leurs parents. Un chiffre qui semble augmenter de manière exponentielle en banlieue... Une étude sur la cible marketing des jeunes de banlieues du site Dyn-com le confirme : sur le 1,7 million de jeunes de moins de 25 ans qui vit en banlieue, « La plupart (vivent) chez leurs parents subviennent à leurs besoins primaires. Ils consacrent, ainsi, la majeure partie de leur budget aux dépenses de loisirs et d’habillement ».

Enora habite Saint-Denis, cette jeune diplômée est chargée de clientèle dans une banque, et touche un peu plus de 1 400 euros net par mois : de quoi payer son propre loyer, en théorie. Mais elle ne compte pas partir de chez ses parents, « pas avant de se marier ». Elle ne considère d’ailleurs pas qu’elle habite chez ses parents. « Ah non ! Je ne vis pas chez mes parents. Je vis chez moi ! » Les tâches ménagères, les repas seule face à la télé, les dîners faits de soupes en brique, très peu pour elle, affirme-t-elle.

Mais c’est aussi un choix économique pour cette jeune femme : jusqu’à la dernière rentrée, elle n’avait fait que des stages. Une fois par trimestre, elle touchait donc quelques indemnités (500 euros en moyenne). Dans ces conditions, être logée, nourrie et blanchie gratuitement ne se refuse pas !

Une économie substantielle en comparaison du budget de ses amis « indépendants ». Comme Pacifique : depuis son arrivée en métropôle, à 18 ans, il a « son apart’ » et travaille pour faire face à ses frais : 90 euros d’inscription annuelle à la fac, 470 euros de loyer mensuel, 200 euros de courses alimentaires par mois, 60 euros de carte Imagin’R, 30 euros d’Internet, 40 euros de téléphone portable... Le rapport coût/indépendance est trop élevé à payer selon les Tanguy : Toujours selon l’INSEE, environ 17 % des jeunes adultes ne vivant pas chez leurs parents sont pauvres en termes de conditions de vie contre 13 % pour l’ensemble de la population.

C’est pour cela que d’autres jeunes, comme Marc, 29 ans, consultant pour une agence de communication, se « Tanguyisent » malgré eux. Il vit toujours chez ses parents à Saint-Ouen. En cause ? La pénurie de logements de petite taille dans les grandes villes Ainsi, même si les Tanguy envisageaient de quitter le nid pour prendre leur envol, tout ne serait pas si simple. En imaginant qu’ils trouvent un studio idéal (une cuisine de plus de 2m2, une fenêtre et un paillasson généreusement offert par le prédécesseur) il leur faudra encore remplir un dossier de « candidature » : 3 dernières fiches de paye, avis d’imposition, 1 mois de caution, bientôt analyses d’urines et test HIV... et un garant. C’est là que le bas blesse : Où trouver un garant quand on subvient aux besoins de ses propres parents ?

Sandra, 25 ans, habite dans les quartiers Nord de Marseille. Si elle et ses sœurs restent chez leur mère, c’est avant tout par solidarité. « Notre mère était femme au foyer jusqu’à ce que notre père la quitte, en 2004. Il a payé 450 euros de pension alimentaire les premiers temps, aujourd’hui il ne paye plus rien puisque nous sommes majeurs. Elle n’a aucune expérience donc n’est embauchée nulle part. Ma sœur est commerciale et mon frère agent immobilier, à nous 3 nous gagnons 4 500 euros. Ce qui permet de payer le loyer, les factures : le jour où nous partons, ma mère ne pourra plus subvenir à ses besoins. »

Mais pour les Tanguy mâles, un autre critère vient s’ajouter aux précédents : ils attendent le mariage pour partir, mais se marient de plus en plus tard. En cause : la promise introuvable. Eh oui ! Comment choisir une femme acceptable quand on est habitué à avoir une mère à sa dévotion, qui ramasse ses chaussettes, cuisine ses dîners et fait son lit sans rien demander en retour ?

Par Marlène Schiapppa

Marlène Schiapppa -