L’avenir des transferts est aux méthodes alternatives
Jeudi 26/02/2009 | Posté par Alexander Knetig
TRANSFERT D’ARGENT 5/5. Suite notre reportage qui clôt notre mini-série. Albert reçoit finalement l’argent que lui a envoyé sa famille. Il n’est plus qu’à quelques mètres de PVC de son rêve !
Comme beaucoup de Sénégalais, Albert Carera tente tous les jours de trouver des alternatives aux transferts coûteux, qu’ils s’agissent de Bana-Bana, de banques classiques ou de confréries religieuses. Car il a besoin de cet argent : après avoir creuser la terre pendant bien sept heures, il devra retourner à Louga. Une de ses connaissances lui a dit qu’un « homme d’affaires italien » (donc un Bana-Bana qui vit partiellement en Italie) est arrivé et qu’un de ses parents lui a confié de l’argent pour la ferme d’Albert.
Comme d’habitude, Albert Carera va donc louer l’âne et la charrette de son ami et se rendre la Louga. En chemin, il aide quelques habitants d’un village qui borde la route. Avant de repartir, le plus vieux d’entre eux, un homme maigre à la barbe longue (le chef du village ?) sort de sa cabane en banco et lui donne un petit paquet. À l’intérieur, Albert découvre le téléphone portable du vieil homme. Il lui promet de le lui rapporter dans quelques jours et cravache l’âne pour commencer son retour.
Pour lui, ce téléphone portable est le symbole du développement du Sénégal – et de tout ce qui reste encore à faire. « Vous savez, cela fait maintenant bien deux ou trois ans qu’ils captent dans ce village et que leurs enfants à l’étranger leur ont envoyé des portables. Ils ont juste oublié qu’il n’y avait pas d’électricité pour les recharger… »
Pendant ce temps, le soleil continue de brûler le sol poussiéreux. Difficile d’imaginer que des melons, des concombres et des tomates puissent pousser ici à un moment donné de l’année. Rien n’est vert dans ce « jardin », tout est orange, brun, jaune. Les couleurs chaudes de la terre sous le soleil blanc du Sahel.
Mais Albert est opiniâtre, il pense que l’introduction d’un système moderne d’irrigation est possible, puisque le fleuve n’est qu’à deux cents mètres. Il a juste besoin d’assez de tubes PVC pour relier son lotissement avec le fleuve Sénégal. « Un tube fait 6,5 mètres, commence-t-il à calculer. À chaque fois que j’en achète un, je m’approche de plus de six mètres de mon objectif. » Mais les tubes coûtent chers, puisqu’ils doivent être importés. Leur prix s’élève à 17 000 Francs CFA (environ 30 euros) par pièce. Albert aura donc besoin de l’argent qu’il attend à Louga : plus de 40 mètres de tubes le séparent encore de son rêve.
« Cela va me prendre encore quatre ans, cinq peut-être, pour atteindre le fleuve, murmure-t-il. Mais après, je vais transformer ce terrain sec en un paradis sur terre. » À nouveau, il sourit.
Alexander Knetig
Par Anonyme