Catherine Barba, trait d’union entre Web et banlieue
Dimanche 26/10/2008 | Posté par Marlène Schiappa
Celle qui à l’époque se sentait perdue dans l’univers des grandes entreprises est aujourd’hui devenue une femme d’affaires à la tête de plusieurs sociétés qui marraine des jeunes de banlieue. Portrait
Quand l’hôtesse d’accueil m’ouvre et me conduit à Catherine Barba, j’ai du mal à croire qu’il s’agisse de la grande prêtresse du Web, fondatrice et directrice de plusieurs grandes entreprises. Si vous croisez Catherine Barba dans la rue, vous ne penserez sûrement pas que ce mélange d’Eva Longoria et Amélie Poulain, qui arbore coiffure fashion, sourire angélique et bottes à talons hauts, est une femme d’affaires aguerrie !
Et pourtant, elle se définit elle-même comme une « mamie du Web », puisqu’elle a découvert Internet en 1995, a fondé OMD Interactive (une agence média) puis a rejoint I-France en tant que Directrice générale « Au tout début de ma carrière, je n’y connaissais rien, je suivais partout comme un petit chien la personne qui m’avait recrutée, sans savoir que c’était... la Directrice Monde ! » Pour elle, l’entreprise est comme « une ville étrangère, qu’on ne peut pas connaître avant d’y avoir été ».
Elle fonde en 2004 Cashstore.fr, un guide d’achat, sur un modèle économique original : les annonceurs lui payent une commission pour les acheteurs apportés, et au lieu de la garder intégralement, Cashstore.fr en reverse une partie à ses clients, qui sont ainsi payés pour dépenser de l’argent ! Catherine Barba n’aime visiblement pas la facilité : son mari a créé sa société (la maison de disque en ligne Believe) en même temps qu'elle. Ils ont ainsi passé des soirées entières à travailler, côte à côte sur leur canapé, avec chacun un ordinateur sur les genoux. « Le tout quand notre fille était encore bébé ! Nous avons donc, en fait, eu des triplés... », sourit-elle. Mais aujourd’hui, ce qui m’amène dans le bureau de Catherine Barba, c’est la banlieue. Il est fréquent d’entendre à ce sujet de longs discours de PDG qui n’ont jamais vu un jeune de banlieue « en vrai ». Catherine Barba, elle, mouille sa chemise Prada : En plus de son activité de CEO (chef d’entreprise), elle est marraine de Nos Quartiers ont des talents et membre de 100 000 entrepreneurs, qu’elle a rejoint en perdant un pari.
À cette occasion, elle n’hésite pas à aller dans les établissements de ZEP (zone d’éducation prioritaire) pour partager avec les élèves son goût de l’entreprenariat. « En banlieue, tous les jeunes ont envie de créer une boîte, dès le plus jeune âge ! Ils ont une créativité et une envie de réussir qu’on ne trouve pas ailleurs ! » Avec Nos quartiers ont des talents, elle marraine des Bac +4 qui ne trouvent pas de travail malgré leurs diplômes. Une tâche qui s’avère parfois difficile car « les jeunes qui rencontrent des problèmes les associent toujours à la banlieue, sans se remettre en cause. C’est surtout du coaching qu’il faut faire, leur donner confiance en eux. »
À son échelle, Catherine Barba fait de la redistribution. Si elle parle avec passion des jeunes dont elle a croisé le chemin, elle reste en revanche très discrète sur son histoire personnelle. « C’est bon d’aider les autres, de penser à autre chose que son chiffre d’affaires. Ça doit être dans mon ADN, ou ma mentalité catholique. Ou parce que je viens moi-même d’un milieu défavorisé » confie-t-elle simplement. « Quand ma fille sera en âge de travailler, elle aura tout le réseau nécessaire pour trouver un boulot. Qu’en est-il des enfants qui n’ont pas cette chance ? C’est ce qui me motive. »
Pour aller plus loin, Catherine Barba a créé avec d’autres chefs d’entreprises, un site pour lequel elle est bénévole : ProDunJour. Un professionnel propose à un élève de l’accompagner pendant une journée de travail, pour observer et voir si ça lui plaît réellement. Une vraie passerelle entre l’école et l’entreprise. Au moment où je lui demande si elle reste en contact avec ses filleuls, son portable sonne : elle reçoit un message de l’un d’eux qui la tient informée de son évolution.
D’ailleurs, ils ne tarissent pas d’éloge sur elle. J’aurais beau chercher, appeler ses anciens collègues pour dénicher un « dossier », impossible de trouver une seule personne pour en dire du mal ! Belle, brillante, altruiste, sont les mots qui reviennent le plus souvent… ça en deviendrait presque énervant ! J’espère glaner quelque chose de croustillant lorsqu’un chef d’entreprise, ancien filleul, me dit au téléphone : « Ah, vous appelez de la part de Catherine Barba ? Alors, je vais vous dire… » Suspense, j’attends une révélation : « Je suis un admirateur inconditionnel ! Elle est épatante. Et encore, il y a plein de choses qu’on ne sait pas sur elle : par exemple elle prend des cours de boxe… »
Elle ne s’arrête donc jamais ! Son secret : « Je pars aussi souvent que possible, entre deux projets, me ressourcer en Corse, d’où est originaire mon mari. » Le dernier : importer le CyberMonday en France « Ça va être une journée de fête où Internet descend dans la rue, juste avant Noël ! » La plupart de ses filleuls banlieusards travaillent aujourd’hui sur le Web comme elle, qu’ils aient monté leur entreprise ou qu’ils soient salariés. La banlieue et Internet, une histoire d’amour qui ne fait que commencer…
Par Anonyme